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 [Récit] Une mission ordinaire

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Elyrine

Elyrine


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MessageSujet: [Récit] Une mission ordinaire   [Récit] Une mission ordinaire I_icon_minitimeVen 10 Juil - 17:29

Quelque part, au Sud des Maleterres de l'Ouest.

Un soir d'automne.

Le vent frais balaie les feuilles mortes sur la route. Un cavalier chemine le long du sentier, observant les bas-côtés avec prudence. La boue s'accumule sur le chemin encaissé, crottant les sabots et les pattes du cheval harassé. La nuit ne va plus tarder, l'air se rafraichit et le soleil décroit.

Fort heureusement, des lueurs discrètes percent la pénombre du soir, au détour d'un virage : les lampadaires de la Point du Noroît. Les bourrasques de vent les cachent derrière les branches des arbres, au hasard des rafales, mais il n'y a plus de doute : la halte n'est pas loin.


Brodrick laisse échapper un soupir de soulagement. Le voyage a été particulièrement long et éprouvant, à travers les cols déjà enneigés d'Alterac. Il n'est pas faché de trouver un vrai refuge, après plusieurs jours passés à grelotter près d'un feu faiblissant. Il va trouver un repas convenable et un lit décent.

Il est persuadé que sa monture ne se plaindra pas non plus : une grange digne de ce nom l'attendait. Trottinant entre les derniers buissons sauvages, le voyageur arrive devant les premières maisons du bourg.


Pointe du Noroît, c'est le dernier établissement totalement sûr des Maleterres. Ces dernières années, la bataille pour Andorhal avait prouvé que rien n'était gagné d'avance. L'Alliance ici, pourtant, n'a jamais relâché sa présence. Les miliciens, les colons et les soldats du Front du Nord vont et viennent dans la grand'rue, se préparant pour la nuit.

Dans le Nord, mieux vaut ne pas dormir à la belle étoile, surtout si près des terres infestées de zombies. Tout récemment, le Fléau a cédé la place aux Réprouvés, mais Brodrick n'est pas sûr de gagner au change. Dès l'entrée du village, il est sommairement interrogé par les gardes, mais son tabard lui tient lieu de laisser-passer.


En tant que membre de la Croisade d'Argent, il comprend tout à fait ces mesures de sécurité ; il observe les passants, les saluant de la tête. Le ciel s'est un peu encombré. Des nuages noirs, menaçants, viennent assombrir un peu plus cette fin de journée. Il passe une main lasse dans sa barbe et grommèle.

"Comme si les Réprouvés ne suffisaient pas, il faut qu'on ait en plus à subir le mauvais temps... L'automne est bien en avance cette année."


Dans le conflit qui oppose la Horde et l'Alliance, Brodrick devrait en théorie se rallier à la position officielle de sa fraternité, à savoir une stricte neutralité. Toutefois, son coeur d'Humain le pousse à préférer voir Azeroth dominé par l'Alliance. Quant à la Horde, son soutien à Sylvanas suffit à la décrédibiliser. En tant qu'homme de foi, le royaume de Fossoyeuse lui retourne les tripes ; en tant que patriote, il l'exaspère.


Il descend devant l'auberge du bourg. C'est le bâtiment le plus grand et probablement le mieux entretenu. Il domine les autres bicoques de plusieurs étages. Le toit de chaume semble accablé par la fraicheur nocturne. Les murs à moitié décatis penchent de tous côtés. Un fanal suspendu au-dessus de la porte jette une lumière crue sur le porche.

Un palefrenier vient emmener son fidèle destrier. Brodrick caresse la tête de son brave cheval, lui promettant une carotte quand ils retourneront dans le Sud. Il donne une pièce au valet et secoue sa cape avant d'entrer ; la bruine du soir colle déjà à son manteau.


La salle commune de l'auberge est une immense pièce, chaude, accueillante. Une dizaine de clients mangent la soupe du soir, attablés ici et là. Quelques-uns disputent des parties de Hearthstone. L'aubergiste salue le nouveau-venu tout en essuyant un verre sale avec un chiffon tout aussi sale.


Le long du comptoir, quatre autres clients occupent les strapontins. Il y a deux nain bourrus, à la barbe courte, comparant à vive voix les mérites de leurs familles ; un gnome rehaussé sur trois coussins, qui marmonne en recouvrant de schémas des parchemins étalés sur le bar ; et enfin une jeune femme plutôt discrète, sirotant un verre d'alcool indéterminé.

Son regard s'attarde vaguement sur elle. C'est une jeune femme élancée, très maigre, à la peau pâle. Elle porte une robe longue à taille haute, serrée par une ceinture en soie. Elle croise ses yeux l'espace d'une seconde, ce contact suffit à troubler profondément le jeune croisé.


Sans dire un mot, il se dirige vers une table libre. Il s'y installe en faisant gémir la chaise sous son poids. Kendall doit avoir été prévenu de son arrivée par la milice ; depuis le cimetière du Nord, il lui faudra sans doute quelques heures pour rejoindre Pointe du Noroît. Il ne lui reste plus qu'à tuer le temps.

Tuer le temps ? Dans les Maleterres ? Brodrick pouffe de rire à son propre humour.


Il jette un regard circulaire, observant un moment les joueurs de carte. Tiens, il faudra qu'il apprenne ce jeu un de ces jours. Après cette réflexion, il retourna les yeux vers le comptoir. Les deux nains se disputaient encore, le gnome écrivait toujours ses plans d'invention. Mais nulle trace de la jeune demoiselle.

Et pour cause, elle apparait juste devant lui, son verre dans la main, un sourire timide sur les lèvres. Elle a une beauté fragile, presque intimidante. Elle semble très fatiguée, comme si elle ne dormait pas beaucoup. Pourtant elle n'a pas de cernes. Brodrick sursaute, surpris, mais elle parle en premier :
"Puis-je me joindre à vous ?
-Je vous en prie, répond-t-il en indiquant la chaise libre en face de lui. Vous abordez souvent les étrangers de passage ?
-Non", reconnait la femme en prenant place. Elle poser son verre sur la table, il semble glisser sur le bois. Sa robe émet un froufrou discret tandis qu'elle se glisse sur la chaise. Elle porte des longs gants noirs qui remontent jusqu'au-dessus de ses coudes, ce qui lui donne un air très distingué.


Mais le plus remarquable, ce sont ses deux yeux, qui brûlent d'une flamme dorée surnaturelle. Brodrick a beaucoup de mal à s'en détacher.
Finalement, passer le temps ici ne serait pas trop ennuyeux, en si charmante compagnie.

"Vous me dévorez du regard ? Note la jeune femme.
-Vos yeux ont une étrange lueur, avoue-t-il.
-Je sais, je sais.
-Ils brillent avec intensité. Seriez-vous une sang-mêlée elfe ?
-On ne peut rien vous cacher, sourit-elle.
-Etait-ce votre père ou votre mère ?
-Quoi donc ? Demande-t-elle, penchant la tête de côté.
-Eh bien, qui était Haut-elfe ?"

Elle a un rire cristallin et secoue la tête :
"C'est une question bien indiscrète !
-C'est vrai, s'excuse Brodrick. Pardonnez ma curiosité.
-Vous êtes tout excusé... sire ?
-Brodrick. Frère croisé.
-Enchantée.
-Et vous, quel est votre nom ? Si j'ose le demander.
-Osez, osez", rit-elle.


Elle a les dents blanches et la voix doucereuse, ouatée. Ses doigts recoiffent sa longue chevelure sombre, qui encadre son visage iboréen. Elle caresse distraitement le rebord de sa chope. Brodrick en oublie sa question.

"Vous ne venez donc pas souvent ici ? S'enquiert-elle, en posant la tête dans ses mains.
-Non, je ne suis que de passage, explique Brodrick.
-Je vois. Vous avez donc pris une chambre ici ?
-Non, pas encore. Mais...
-Dans ce cas, vous n'aurez pas à le faire. Vous n'aurez qu'à partager la mienne."

Brodrick manque de s'étrangler. Il observe la jeune femme avec un intérêt renouvelé. Il n'avait encore jamais vu une femme avec une peau de nacre, des longs doigts fins, des yeux dorés... Et un caractère aussi direct !
"Ce ne serait pas approprié, proteste-t-il.
-La Croisade d'argent fait beaucoup pour nous ici, répond la jeune femme, avec un sourire mystérieux. Il me parait normal de lui rendre service en retour.
-Vous n'avez pas peur des racontars ?
-J'ai toute confiance en votre chevalerie.
-Je vois. Eh bien, vous ne devriez pas trop. Je reste un homme. Du reste, deux étrangers à la même chambre, cela viole toutes les convenances.
-Je me moque de l'opinion des autres. Vous me plaisez. Mais peut-être que vous préférez prendre une chambre seul ?"


Il réfléchit et secoue la tête :

"Eh bien, pas nécessairement, concède t-il.

-Voulez-vous la voir ?

-Quoi donc ?

-Ma chambre. Elle n'est pas très jolie, mais la simplicité vaut tous les palais.

-Quoi, vous voulez y aller maintenant ?

-Vous avez mieux à faire ?"

Brodrick se gratte la barbe, pensif.

"Pas vraiment, mais... Rien ne presse.

-A quoi bon attendre ? Il faut savoir profiter de l'instant présent. On ne sait pas quand on mourra.

-Ce n'est pas une philosophie très joyeuse.

-Mais adaptée à la région.

-Je le concède."


Elle se lève de chaise, marchant vers les escaliers. Elle se tourne à demi, lui faisant un clin d'oeil :

"Venez-vous ?

-Vous êtes une femme hors du commun", remarque-t-il en la suivant.


Il court presque, à vrai dire.


La chambre est un des dernières, au plus haut étage du bâtiment. La jeune femme allume un chandelier posé sur un guéridon et se glisse de côté, laissant Brodrick apprécier la disposition des lieux.
Un lit, quelques armoires et coffres encombrent le passage. La paillasse est assez grande pour accueillir deux personnes. La pièce est remplie de recoins sombres, que même la lueur des chandelles ne parvient pas à disperser. L'ensemble est plutôt sombre, mais quoi d'étonnant dans ce pays sinistré.


"Vous voyez, ce n'est pas très joli, regrette la jeune femme en posant le candélabre.

-Votre beauté le compense largement, déclare Brodrick en la contemplant. La lumière tremblante tisse des jeux d'ombre et de feu sur les courbes de la demoiselle.

-Vous avez dû dire cela à bien des femmes, ricane-t-elle en posant les mains sur ses hanches.

-Vous êtes la première pour laquelle je le pense."


Il tend une main vers elle, effleurant sa joue.

"Sainte Lumière, jure-t-il. Vous êtes glacée !"


Elle hoche de la tête, s'entourant de ses bras.

"Je peux vous réchauffer, si vous voulez..., toussote-t-il.
-Ce ne sera pas nécessaire."

Brodrick eut un sursaut de surprise. Il ne s'attendait certes pas à cette réponse. Comme pour prévenir sa question, elle lui adresse un nouveau sourire :
"Vous serez vous-même bientôt froid."

Brodrick recule de deux pas. Il sent un frisson lui parcourir l'échine.
"Par Uther... Vous n'êtes ni humaine ni elfe !
-Un peu des deux...
-Vous êtes surtout morte !
-C'est exact."

Il n'a pas le temps d'appeler à l'aide. Derrière lui, bondissant hors de l'ombre, une énorme araignée vient de sauter dans son dos. Les mandibules se plantent dans sa nuque, injectant un venin virulent. Brodrick émet un gargouillis horrible, titube quelques secondes, puis bascule en avant.

Son corps s'effondre sur le plancher dans un craquement sinistre. Il a encore quelques soubresauts, bavant une salive verte, les yeux révulsés. L'araignée apprivoisée prélève déjà son tribut sur sa chair, grésillant de plaisir. Elyrine hoche de la tête et tapote la tête ronde de la créature.


Sans autre formalité, elle retourne le cadavre du croisé, s'accroupit dessus et lui fouille les poches. Elle trouve rapidement dans son pantalon le pli qu'elle cherche. Pour revenir d'aussi loin, ce type ne pouvait être qu'un messager important. Elle décachète le courrier et le parcourt rapidement.

Un sourire amusé déforme son visage albâtre. Ces renseignements raviront les exécuteurs de la Barricade. Elle le jette sur le lit et se déshabille à la hâte, laissant sa robe tomber sur le plancher. En moins d'une minute, elle a tiré d'un coffre sa panoplie de traqueuse, enfilé ses gants, son justaucorps et remis sa longue cape.

Elle achève de glisser ses poignards dans ses bottes, quand quelqu'un frappe à la porte.

Par tous les démons, cet imbécile est sans doute attendu. Elyrine n'a pas prévu cela. Elle se met à réfléchir à toute vitesse, tendant la main vers son araignée pour la calmer : la bête commençe déjà à siffler méchamment.


Quelques secondes plus tard, la porte de la chambre vole en éclats, laissant entrer le paladin Kendall et trois autres frères de la croisade. Ils découvrent aussitôt le corps inanimé de leur messager - et une fenêtre grande ouverte sur les ténèbres de la nuit. Un vent glacial les fouette aussitôt.


Mission accomplie.

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